FRESNES SUR SCÈNE

« Je suis Lou Cantor, chorégraphe de la compagnie Ulysse et Ernest, avec laquelle je mène depuis quelques années un travail autour de l’humain et recherche les façons dont on peut mettre en valeur les histoires de chacun au travers de la danse.

J’ai rencontré Pierric il y a quelques mois alors qu’il donnait un atelier auprès de personnes malades, en lien avec le Théâtre de l’Odéon. Il m’a immédiatement semblé évident qu’une collaboration pouvait être extrêmement enrichissante.

En tant que chorégraphe, je souhaite permettre à chaque personne de se raconter soi, d’explorer, par la danse et par le corps en général tout un panel de ce qui nous constitue.

Et alors que le corps raconte beaucoup, un travail avec Pierric me permettra de découvrir tout un autre univers qu’est la parole, le jeu, le texte. J’en suis extrêmement curieuse, et cela enrichira, je le sais d’avance, ma pratique.
Nous avons tous les deux une expérience dans le milieu carcéral et sommes tous les deux très en demande pour poursuivre ces rencontres – chaque fois incroyables et mémorables – avec les personnes détenues.

Je crois que nous souhaitons, au travers ces ateliers, explorer ensemble ce que chacun pourrait jouer, danser, clamer, donner, vivre … ce qui les construit, entant qu’individus, et non pas entant que détenu. »

Lou Cantor

« Je crois profondément, pour être intervenu plusieurs fois dans le milieu carcéral, que l’artiste y a toute sa place. Et que bien que son intervention paraisse parfois dérisoire au départ, elle devient, par expérience, fondamentale à la fin.

Je veux dire par là que notre travail, en tant que chorégraphe, ou acteur, n’est pas indispensable, mais il est, à mon sens, nécessaire.

Combien de personnes incarcérées sont venues au départ « faire du théâtre » simplement pour sortir de leurs cellules, par distraction, et sont sorties avec le désir profond de devenir acteur, actrice, danseur, danseuse, ou écrivain, écrivaine, technicien, décorateur, menuisier, qu’importe d’ailleurs. Mais en tout cas avec le désir d’accomplir quelque chose de plus fondamental dans leur vie.

C’est cela avant tout que nous allons chercher avec eux, Lou et moi, chacun à notre manière, avec chacun notre savoir-faire, entre le corps et les mots. En dialoguant ensemble. Avec eux.

L’autre soir par exemple, en rentrant chez moi, je suis tombé sur Kamel, un ancien détenu avec qui j’ai pu collaborer à Arles, qui m’a pris dans les bras, et qui m’a dit « Franchement au début j’y allais juste pour sortir de ma cellule et en vérité grâce à vous je suis sorti d’une spirale dont je n’arrivais plus à m’extirper ». Il a trouvé un agent artistique et est devenu acteur pour la télévision.

Et ce n’est pas toujours le cas, parfois nous échouons, mais nous essayons toujours de faire en sorte que les personnes incarcérées puissent avant tout, par le travail au plateau, ouvrir leurs imaginaires, et ouvrir son imaginaire c’est déjà rêver un autre réel possible. »

Pierric Plathier

Plus d’information sur le site theatre-odeon.eu